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L’expérience collaborateur à l’heure du digital, les entreprises sont-elles prêtes ?

Le management et singulièrement la gestion des RH connaissent des modes qui se caractérisent par des concepts, souvent pertinents mais dont la mise en action peine souvent à dépasser les mots.  
Parmi les tendances apparues il y a quelques années et toujours d’actualité on trouve l’expérience collaborateur. 
Mais de quoi parlons-nous précisément ? Quels en sont les enjeux ?  
Comment améliorer cette expérience collaborateur dans ce contexte de digitalisation des contacts ? 

Définir l’expérience collaborateur !

Une définition simple de la notion d’expérience collaborateur pourrait être :  
Ce dont on se souvient quand on a oublié tout ce qui s’est passé entre le jour où on a signé son contrat de travail et celui où on a reçu son solde de tout compte.  

Or vous pouvez faire l’expérience vous-même si vous avez déjà quitté une entreprise. Ce dont nous nous souvenons n’est pas la routine quotidienne, les tâches et les dossiers que nous avons traités, quand bien même nous en avons retiré un certain plaisir. 
Pour paraphraser Voltaire, seul ce qui est passé par le cœur s’est gravé dans la mémoire. En d’autres termes nous ne nous souvenons que des meilleurs moments…et des pires.  

Si on se souvient de belles réussites ou de combats périlleux, les meilleurs moments sont aussi le fruit d’interactions humaines et parfois en marge du travail lui-même. Lorsque nous avons été félicités pour notre travail bien sûr, mais aussi ce repas, ce séminaire, ce pot de départ ou ce fou rire à la machine à café. Bref, les moments où nous avons pris du plaisir à partager quelque chose entre humains. Mis bout à bout ces quelques instants résument 10 ans de carrière ! 
Quant aux pires, ils sont presque exclusivement, directement ou indirectement, les conséquences des défaillances du management au sens large. Le jour où nous n’avons pas eu le soutien de notre hiérarchie, le manque de reconnaissance de nos efforts, les injustices, la surcharge de travail, les mots qui nous ont blessés, les mauvaises conditions de travail… Autant de manquement de l’entreprise et donc de son management.  

On peut d’ailleurs affirmer sans grand risque que si on rejoint une entreprise… On quitte son manager ! Il n’y a guère qu’en début de carrière que la rémunération peut supplanter les autres facteurs d’attrition. Et encore, n’est-ce pas là le signe que l’entreprise compense par la rémunération des facteurs jugés essentiels comme la flexibilité pour organiser son temps, son équilibre pro-perso, le développement de ses compétences, les perspectives, une bonne ambiance de travail ou l’attribution de responsabilité ? 

Ainsi, l’expérience collaborateur est avant tout une expérience humaine faite d’émotions. D’ailleurs les discours émus de ceux qui quittent l’entreprise font presque toujours référence à « une aventure humaine ». 

Ce n’est probablement pas un hasard si cette quête d’expérience collaborateur s’exacerbe avec la digitalisation au sens large et plus spécifiquement le développement du télétravail et du travail hybride. Pourquoi ? Parce-que ce sont justement les rapports humains qui s’en trouvent a minima bouleversés, souvent détériorés et au pire anéantis. 

Ce qui se vit à l’intérieur, se voit à l’extérieur 

Henry Ford affirmait que « Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes. ». N’appréhendait-il pas avant l’heure dans cette phrase les fondements de l’expérience collaborateur ? 

Ce serait une erreur de prendre en compte séparément ces deux variables que sont le capital humain et la réputation de l’entreprise. En effet, la réputation ne repose pas seulement sur la qualité des produits et l’image de la marque. Ce que vivent les collaborateurs au sein de l’entreprise est tout aussi essentiel. Pensez à ces entreprises dont le management a été vilipendé sous les feux de l’actualité et de l’impact sur leur image de marque. Certaines ne sont-elles pas boycottées par des clients potentiels au nom des conditions de travail, alors qu’ils n’y travaillent pas eux-mêmes ? 
Si un de nos amis nous dépeint l’enfer humain qu’il vit au quotidien dans son entreprise, quel impact cela aura-t-il sur notre comportement en tant que consommateur ou comme potentiel collaborateur ?  
Dès lors, on peut affirmer que l’expérience collaborateur est donc tout autant un affaire interne qu’un enjeu externe. 

C’est un ensemble de critères interdépendants sur lequel doit veiller l’entreprise pour s’assurer que les collaborateurs bénéficient d’une expérience de qualité.  

Quant aux conséquences elles sont tout aussi intriquées : 

Un rapport employeur- employé qui s’est transformé au cours des décennies

Au début du siècle dernier, une main d’œuvre abondante bon marché et interchangeable, des méthodes de production normées, un lieu de production et des machines performantes… Saupoudrez le tout d’un peu de paternalisme et vous obtenez l’équation d’une entreprise rentable de cette époque. 

Parallèlement à la tertiarisation de l’économie et l’informatisation, la main d’œuvre est devenue ressource humaine. Plus spécialisée, plus qualifiée et donc moins interchangeable.  

Les process deviennent plus complexes et moins durables. Les lieux de production se spécialisent, se multiplient et s’interconnectent. On commence à prendre conscience de l’importance du capital humain. On n’obéit plus à un chef, on est coaché par son manager.  Le vocabulaire change et les approches évoluent mais dans un contexte de chômage de masse sur fond de crise économique l’employeur garde une sorte d’« ascendant » sur le collaborateur. 

Le contexte actuel est radicalement différent et porte le coup de grâce aux anciens modèles 

Il y a une véritable guerre des talents pour les emplois les plus qualifiés (qui va s’exacerber avec le départ des boomers.)  En outre, les « années Covid » ont amplifié une quête de sens qui va au-delà de « à quoi sert mon travail » et tend vers « qu’est-ce que j’apporte à la société, voire au reste du monde ».  Par ailleurs, le souhait d’un équilibre vie professionnelle vie personnelle est plus fort que jamais. 
Enfin, avec les outils numériques, fini le théâtre classique et son unité de temps de lieu et d’action. Les contraintes géographiques ne sont plus décisives. 
Pour l’ensemble de ces raisons, quitter son employeur n’est plus considéré comme un sacrilège ni un sabordage. C’est particulièrement vrai chez les jeunes génération (X,Y,Z). 

On l’aura compris, l’expérience collaborateur est loin d’être un gimmick de plus pour les DRH et autres consultants. Les enjeux sont nombreux et profonds et la grande majorité des entreprises en sont conscientes.  

Mais combien d’entre-elles se sont profondément penchées sur la dimension digitale et distancielle ?  
Comment gérer la charge de travail pour concilier productivité et bien-être ?  
Comment tisser le lien social si important pour des collaborateurs qui se voient peu ou pas du tout ? 
Quels nouvelles pratiques managériales faut-il inventer ? 

Autant de questions que devraient dès aujourd’hui se poser les DRH… Et y répondre sans tarder s’ils veulent attirer et favoriser l’épanouissement professionnel des meilleurs talents. 
Sauf à se résoudre à les voir partir ! 

Le chantier est vaste. Mais certaines actions peuvent être mises en œuvre avec un important retour sur investissement. 

Un audit préalable des étapes-clés* qui jalonnent la vie du collaborateur permettra de prendre conscience des atouts à conserver et des améliorations à façonner pour en faire, au-delà des processus de véritables événements. 

Et s’il fallait ensuite s’attacher à quelques chantiers prioritaires, cela pourrait être :  
 

  • Faire du bureau un lieu de vie et d’événements pour retisser le lien entre collaborateurs et équipes et développer le sentiment d’appartenance. 
  • Engager une politique d’onboarding de qualité démarrant par une démarche de pré-boarding pour stimuler l’envie du collaborateur à rejoindre l’entreprise 
  • S’assurer que les pratiques de management évoluent du « commande & contrôle » vers plus de « confiance & de responsabilisation » si ce n’est pas déjà fait. 
  • Dans la veine de l’action précédente : rompre avec les codes du management hiérarchique et réinventer la communication avec les dirigeants en organisant des rencontres régulières et informelles tant en présentiel et qu’en distanciel. 
  • Faciliter les rencontres in vivo entre collaborateurs, en mettant en place des « vis ma vie » par exemple. Mais aussi des moments plus informels, à distance.  
  • Faire gagner du temps aux collaborateurs, cette denrée de plus en plus rare pour chacun en levant les freins à l’organisation souvent compliquées des rencontres tant les disponibilités sont rares.  
  • Repenser les événements collectifs qui favorisent la cohésion et le sentiment d’appartenance : séminaires, formations, anniversaire d’entreprise…  

 

Une liste d’actions non exhaustive mais qui pourrait faire de l’expérience collaborateur un atout concurrentiel décisif. 

Alors, prêts à pour mettre le digital au service de la relation et pas seulement de la production ? 
 

* Accueil et intégration, EAP, entretien d’évolution, promotion, mobilité, départ, réseau des anciens 

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Sébastien Saint-Cricq

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